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LÉGISLATIVES, LA VICTOIRE DES VAINCUS

À minuit, l’heure des crimes sordides, ils ont réveillé la presse pour, avec des mines de rescapés d’un naufrage. Ils sont venus dire aux Sénégalais dont beaucoup fêtaient eux leur défaite qu’ils avaient « gagné » 35 des 45 départements du pays. Ce n’était pas drôle, mais d’un tel ridicule qu’on a éclaté de rire devant nos petits écrans : les vaincus fêtaient leur victoire. Victoire qu’ils étaient les seuls à voir, avec des mines de déterrés. Depuis que le ridicule est devenu une valeur et non une honte, tout est possible.

Ne croyant pas aux miracles, j’ai refusé de penser que les tendances lourdes égrenées ce dimanche soir du 31 juillet pendant des heures par les reporters des radios et télés allaient changer notablement, dans les heures et jours suivants et changer ma conviction selon laquelle Benno Book Yaakar (BBY) a bien reçu ce jour historique, une déculottée mémorable.

Quelles que soient les manœuvres qui n’allaitent pas manquer, la gouvernance politique du pays pourrait bien connaître des changements majeurs. Et le président Macky Sall allait connaître des cauchemars pour les deux ans qui lui restent. Parce qu’avec les résultats de ces législatives, son rêve caressé et jamais (encore) avoué d’un troisième mandat venait d’être définitivement enterré par les résultats qui s’égrenaient avec la désagréable musique d’une scie métallique à leurs oreilles bourdonnantes des maudits chiffres issus des urnes.

Il semble bien qu’au-delà de toute attente, avec notamment les ridicules manœuvres de listes électorales amputées de moitié (titulaires pour les uns et suppléants pour les autres), les citoyens aient administré au pouvoir, au parti pris peu éthique de « sa » presse (une véritable cinquième colonne d’une coalition épuisée, usée), une leçon politique majeure : « nous préférons une gouvernance éthique au béton armé d’arène, de stades et autres TER, BRT. Nous votons pour l’espoir que demain la Justice sera juste et non tragiquement sélective, une police qui respecte sa devise, de protéger et servir et non aux ordres de gouvernants provisoires et délestés de ce qui semble être un permis de tuer. Le retour à un véritable service public de l’audiovisuel. Bref, le choix de la morale contre un régime dont les députés se transforment en dealers, trafiquants de passeports, ou, qui gardent par-devers eux des millions au point de se les faire « voler »….

Leur « victoire » est une défaite non assumée, un Waterloo de dimension modeste. S’ils se cramponnent à un résultat d’honneur de 82 députés contre 80 d’une liste largement amputée de ses « stars », c’est pour faire oublier qu’ils dégringolent de 125 députés sur les 165 de la précédente législature à 82 ; qu’ils arrivent notablement derrière l’opposition en termes de voix. Que pour survivre, ils sont obligés de débaucher (acheter) quelques nouveaux députés affamés, ou surtout, amener à Canossa, un politicien au crépuscule de sa vie politique et qui rêve d’occuper à nouveau le perchoir, bien que ne disposant que d’un député. Mais qui vaut cher pour que le cadavre au pouvoir obtienne un sursis afin d’éviter un enterrement prématuré.

Monsieur Pape Diop, a offert sa béquille au sursitaire président. Bientôt on en saura le prix parce que personne ne croit à une mission de sauvetage (du soldat Macky) de nos institutions contre les flibustiers de Yaw-Wallu. De grâce monsieur Diop, n’essayait pas de nous faire croire que vous êtes devenu un Pape investi d’une mission salvatrice contre des irresponsables, couteaux entre les dents, venus charcuter nos institutions. Vous êtes venus vous servir sur la bête et non service la République. En accusant l’opposition victorieuse de desseins cannibales, vous insulter le plus que million et demi de Sénégalais qui ont voté pour elle. Allons ! Ayez donc la trahison « honorable » (si c’est possible) et un certain respect pour ceux qui ont cru à votre discours électoral, vous ont donné leurs voix et à la clé, un député qui vaut plus que les 82 de celui dont vous allez faire les louanges pour les 16 mois qui lui restent pour engloutir nos maigres ressources dans le kérosène de « son » avion à faire le tour du monde au nom d’une certaine Afrique : celle des prédateurs et autres usurpateurs de fonctions…

Enfin, il faudra bien que le chef des « victorieux » du 31 juillet se décide à nommer un Premier ministre. Car comme le notent très judicieusement nos confrères du Témoin dans leur édition de ce mercredi 17 août, cela fait presque huit (8) mois que le roi, locataire du Palais, a pris (édicté, édité) un décret ramenant le poste de ce souffre-douleur de l’institution républicaine, après l’avoir supprimé d’un trait de plume rageur quelques mois plus tôt au motif de « lourdeurs » contre le rythme à impulser à ses réformes. Il n’y a que le Royaume de Belgique qui prend ainsi son temps pour nommer un chef du gouvernement. À la différence que le royaume belge a des régions, populations, des langues différentes et que bien souvent les majorités sont étriquées, voire inexistantes. Mais au royaume du Macky, ce sont les héritiers putatifs qui manquent : il a immolé les prétendants trop pressés, « punis » ceux d’entre eux qui ont perdu des élections ou ont eu l’outrecuidance de rappeler au monarque qu’il vivait les derniers jours de son règne. Crimes de lèse-majesté donc.

Et donc le roi est à poils, nu comme un ver. Pas d’héritiers. Tous reniés. Défroqués. Dégradés de la lignée royale ! Même celle qui a voulu (oser) accélérer la cadence en oubliant que Sa Majesté a une démarche de Sénateur et non les jambes d’un sprinteur. Depuis, elle n’arrête pas de valser au gré des pertes de boussole du navigateur en chef. Une sorte de maquerelle de la République. Ses rêves d’une « remontada » dans l’estime du chef viennent de se fracasser sur la déculottée du 31 juillet. Parce que, même le monarque sait pertinemment que « sa victoire » est une défaite magistrale, historique.

Mais voilà, à force de tuer ses potentiels héritiers, à force de les envoyer au casse-pipe pour sauver un empire en déconfiture du fait des orgies d’une gouvernance putride, à cause de ce cannibalisme royal donc, le monarque n’a plus d’héritiers. Même pour sauver le trône pour les seize mois restants. Ainsi donc, « la plus grande coalition que le pays ait connu » comme ils se qualifiaient dans l’euphorie de  l’arrivée de « mburu ak soow »  s’est transformée en la « plus grande coquille vide » que le pays ait jamais connue. Mais ça, ils refusent encore de le voir, de le reconnaître au mat tanguant d’un paquebot en fin de croisière. Comme le Titanic, ou le Joola, notre tragique Titanic….

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