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DADIS CAMARA EN PRISON

L’ex-dictateur guinéen Moussa Dadis Camara et plusieurs coaccusés ont été envoyés en prison mardi, avant d’être jugés à partir de mercredi pour l’effroyable massacre commis le 28 septembre 2009, ont indiqué leurs avocats.

Le procureur a fait « embarquer nos six clients à la maison centrale (prison) où ils seront semble-t-il retenus jusqu’à la fin de la procédure« , c’est-à-dire du procès, à la durée indéterminée, a déclaré un de ces avocats, Me Salifou Béavogui, à des journalistes devant le tribunal. L’avocat a contesté cette mesure en déclarant: « Très malheureusement, le procès commence par la violation des droits de la défense ».

Un correspondant de l’AFP a vu un minibus quitter à toute allure sous la protection de plusieurs pick-up le tribunal flambant neuf construit exprès pour le procès, et où s’est décidée pendant quelques heures la liberté des accusés.

Le capitaine Camara et dix autres anciens officiels militaires et gouvernementaux doivent répondre à partir de mercredi à 10H00 (locales et GMT) de leur responsabilité présumée dans les évènements du 28 septembre 2009 et des jours suivants. Un certain nombre d’accusés étaient déjà détenus depuis des années.

Les accusés encore libres avaient été convoqués vers 12H00 préalablement au procès. Les craintes de leurs avocats qu’ils ne soient placés en détention se sont révélées fondées.

Le représentant du parquet a lu aux accusés et leurs avocats les textes stipulant que les accusés devaient se constituer prisonniers avant leur procès, a rapporté Me Béavogui. Les avocats ont vainement plaidé que ces dispositions ne s’appliquaient pas parce que les décisions de justice les renvoyant devant le tribunal ne prévoyaient pas explicitement une telle mesure, a-t-il dit.

Les 11 hommes seront jugés à partir de mercredi pour leurs agissements il y a 13 ans.

Des soldats, des policiers et des miliciens avaient fait couler un bain de sang lors du rassemblement de dizaines de milliers de sympathisants de l’opposition, réunis dans un stade de la banlieue de Conakry pour démontrer pacifiquement leur force et dissuader M. Camara de se présenter à la présidentielle de janvier 2010.

Le capitaine Moussa Dadis Camara avait été porté au pouvoir en décembre 2008 par un coup d’Etat militaire. Il avait ensuite été investi président.

Le 28 septembre 2009 et les jours suivants, 156 personnes ont été tuées et des milliers blessées avec une cruauté effrénée, au moins 109 femmes ont été violées, selon le rapport d’une commission d’enquête internationale mandatée par l’ONU.

Les chiffres réels sont probablement plus élevés.

Une multitude de témoignages rapportent comment les Bérets rouges de la garde présidentielle, des policiers et des miliciens sont entrés dans l’enceinte, en ont bouclé les accès et ont ouvert le feu sans discrimination sur une foule civile, festive et désarmée.

L’attente d’un vrai procès

Ils ont poursuivi leur besogne au couteau, à la machette et à la baïonnette, jonchant de cadavres la pelouse, les travées et les couloirs du stade et ses alentours. Ils ont abusé de dizaines de femmes et achevé nombre d’entre elles. Des personnes sont mortes piétinées dans la panique.

Les exactions ont continué les jours suivants, contre des femmes séquestrées et des détenus torturés.

Amnesty International a présenté à la veille du procès un rapport réclamant une meilleure prise en charge des victimes de viols en Guinée et l’adoption « en urgence d’une loi générale sur les violences basées sur le genre ».

Les violences commises il y a 13 ans sont constitutives de crimes contre l’humanité, avait conclu la commission d’enquête internationale rapidement après les faits.

M. Camara vivait jusqu’à présent en exil au Burkina Faso. Il est rentré dans la nuit de samedi à dimanche à Conakry pour participer au procès. Il entend « laver son honneur », disent ses proches.

La commission internationale lui a imputé une « responsabilité criminelle personnelle et une responsabilité de commandement ».

Avec ce procès, des centaines de victimes et proches, constituées en parties civiles ou non, et les organisations de défense des droits humains voient arriver le jour qu’elles ont réclamé pendant 13 ans.

Les atermoiements du pouvoir et l’impunité érigée en « institution« , selon la commission internationale, de forces de sécurité quasiment intouchables dans un pays dirigé pendant des décennies par des régimes autoritaires ont longtemps fait douter de la tenue de ce procès.

L’actuel chef de la junte, le colonel Mamady Doumbouya, également arrivé au pouvoir par un putsch en 2021 après 11 ans de pouvoir civil, a demandé en juillet que le procès ait lieu cette année avant la date anniversaire.

Les associations de victimes réclament cependant un vrai procès. Elles demandent que celui-ci ne se résume pas à son ouverture pour l’effet d’image.

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