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Crime sans châtiment*, un mal sénégalais (Par Abdoulaye Bamba Diallo)

« Le voleur pense que l’honnêteté est une faiblesse. » (John Steinbeck)

Il est des heures et des moments où garder le silence où s’emmurer dans l’indifférence n’honore point celui qui l’adopte. Les péripéties judiciaires nées de la plainte en diffamation du ministre Mame Mbaye Niang à l’encontre du Maire Ousmane Sonko sont une affaire d’une simple banalité.

Les rôles des tribunaux du pays se saisissent régulièrement de pareilles affaires entre justiciables venus demander réparation pour l’affront subi après une offense, une insulte ou une allégation mensongère. Cela fait souvent les gaietés du prétoire avec quelquefois de savoureux duels d’avocats sous l’œil amusé des plaignants, des accusés et du public. Il ne devrait, donc, point y avoir de quoi alarmer tout le pays et le mettre sens dessus-dessous afin de venir à la rescousse de quelqu’un en mauvaise posture à la barre du tribunal.

Ce qui s’est passé le 16 mars dernier et quinze jours auparavant relève de l’agitation politique, de la manipulation et de l’insurrection. L’honneur de chaque individu est équivalent à celui de n’importe quel autre citoyen qui n’a pas subi l’infamie d’une condamnation à la suite d’un comportement délictuel ou d’une infraction.

A ce titre, Mame Mbaye Niang a le droit d’exiger justice afin que son honneur soit rétabli s’il se sent outragé car la pire des accusations a été portée contre lui. Celle d’avoir soustrait frauduleusement l’argent public, le bien commun alors qu’il est investi de l’autorité ministérielle chargée d’en assurer la surveillance et la bonne utilisation.

Il était temps que dans notre pays l’on mette un arrêt ferme à la confusion entretenue entre démocratie et démagogie, liberté et insubordination et refus d’obéir aux lois de la République. Quand l’Etat est fort, il nous écrase et quand il est faible, nous périssons a déjà dit Paul Valéry. Pour la défense du pays, pour la stabilité sociale, l’Etat ne doit jamais être faible. Si force doit rester à la loi, il est heureux que le président de la République ait su faire preuve de discernement en évitant les pièges multiples et sournois que l’on sème sur son chemin depuis sa réélection en 2019.

La précarité sociale accentuée par les crises sanitaire et économique, les reniements politiques, les rancœurs et les frustrations ont pu faire croire à des politiciens écervelés et sans vergogne que le terreau était favorable pour susciter révolte et insurrection. Un calcul puéril calqué sur des réalités fortement différentes de celles du Sénégal a pu faire croire à des « polpotistes », des intolérants que semer le vent de la discorde, porter des coups de canif à la cohésion nationale n’allait faire souffler la tempête que sur leurs adversaires affaiblis parla conjoncture socio-économique et que l’on présente comme étant les ennemis de la Nation et non comme des adversaires politiques que l’on veut remplacer coûte que coûte au point d’aller jusqu’à brûler le pays. Croire que comme au Burkina ou au Mali avec l’aide de nouveaux colonisateurs venus d’Asie et d’Orient, on peut, grâce aux fake news et à l’agit-prop, installer le désordre, peut-être même un début de chaos afin de pousser l’Armée à assurer l’intermède d’une transition avant de retourner aux urnes ne peut être qu’une illusion de révoltés taraudés parles pratiques de l’Extrême droite européenne ou de gauchistes staliniens. Nos Forces de défense et de sécurité ont une haute conception de la Nation, de la République, de l’Etat et de ses Institutions pour céder à des manipulations politiciennes aussi grossières même si le procédé a fait florès dans des pays comme le Mali ou le Burkina. Les officiers supérieurs et les corps intermédiaires de nos forces de défense et de sécurité sont issus des meilleures académies militaires et des meilleures universités de la planète à tel point que l’Onu ou la Cedeao saisissent toutes les opportunités pour les intégrer dans les contingents en charge du maintien de la paix sur les points chauds de la planète.

Si la transhumance et la volteface sur fond de reniement permanent sont devenues les ADN de l’homme politique sénégalais, nos Forces de défense et de sécurité affichent, elles, les gênes de véritables serviteurs de l’Etat et de la nation sachant mettre l’intérêt national et la responsabilité au-dessus des ego fortement égoïstes.

Hormis Macky Sall, Abdoul Mbaye, le leader de l’ACT, Mamadou Lamine Diallo, celui de Tekki, Amadou Doudou Sarr de l’URD/FAL, qui ont des propositions et des projets de développement, c’est le désert des Tartares dans la classe politique où seule la Com’, le buzz et la vitupération servent d’offres programmatiques.

Il faut être sérieux et ne pas croire que notre beau pays, le Sénégal, est un Finistère complètement isolé et coupé du reste de l’Afrique. Le désert avance de quatre kilomètres par an à l’intérieur du pays, le pillage de nos eaux maritimes a atteint son paroxysme avec les Chinois et les Coréens venus s’ajouter aux Européens, la guerre est à nos portes avec quatre ou cinq pays voisins ou proches qui se débattent contre les affres du terrorisme et l’extrémisme religieux. L’espace de stabilité qu’est le pays de Lat Dior et qui accomplit de véritables bonds en avant économiques depuis la première alternance en l’an 2000, ne fait pas que des envieux dans notre sous-région. Certains voudraient voir notre case brûlée comme le feu qui a commencé à ravager leur concession.

Il n’y a qu’une chose à exiger au président Macky Sall. A savoir renouer les ponts et les fils du dialogue entre « Doomi rew-mi » (les enfants du pays) et bâtir un consensus avant la prochaine échéance électorale.

Il ne serait pas raisonnable de reconnaître que jamais l’adversité politique n’a atteint ce niveau de radicalité et de haine entre les enfants d’une même nation. Depuis l’alternance de l’an 2000, les pouvoirs libéraux successifs déploient une rudesse si grande contre leur opposition du moment que cela ressemble quelquefois à la férocité.

Du côté de l’opposition, le manque de fair-play et l’absence de dépassement dus souvent à des ego surdimensionnés les font souvent tomber dans la mauvaise foi en refusant souvent de reconnaître les réussites et les succès du régime en place. Cette tyrannie des ego a conduit à la situation d’autisme et d’enferment ayant abouti au blocage de la scène politique où il n’y a plus ni passerelles, ni go-between, ni médiateurs.

De Senghor à Diouf, les socialistes ont su toujours éviter l’explosion de la marmite en acceptant de dialoguer, de se parler et d’introduire les réformes qui ont élargi les espaces de liberté et consolidé la Démocratie.

Ainsi, est-on passé des quatre courants de pensée de Senghor au multipartisme intégral de Diouf. Du Code de la famille à la Charte culturelle mais aussi du Code électoral consensuel à l’Onel devenu la Cena sous le magistère de Abdoulaye Wade.

En attendant, les deux justiciables que sont Mame Mbaye Niang et Ousmane Sonko assistés de leurs avocats doivent se présenter sans tambour ni trompette à la barre du tribunal le 30 mars prochain. Tout en retenant qu’il ne revient pas à Ousmane Sonko d’asseoir la culpabilité ou non de Mame Mbaye Niang. Cela n’est ni de son ressort, ni de sa compétence. Il y a des structures dédiées à cela comme l’Inspection Générale d’Etat, la Cour des Comptes ou la Chambre financière de la Cour Suprême. Etsi donc, une force doit se manifester c’est celle de la loi et pas celle des gladiateurs ou des manipulateurs. Vive le Sénégal !

* Emprunt au titre du célèbre écrivain russe Fiodor Dostoïevski et son célèbre roman « Crimes et Châtiments ».

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