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SONKO REPRÉSENTE UN DANGER POUR LA DÉMOCRATIE

Alors que le leader de PASTEF  est en plein Nemeku Tour, Seneweb poursuit sa série d’entretiens pour décrypter le phénomène Sonko. Après Siré Sy, c’est au tour de Hamidou Anne, essayiste et chroniqueur de se pencher sur le cas du Maire de Ziguinchor. L’auteur de “Panser l’Afrique qui vient” perçoit l’ascension et les idées de Sonko comme une menace pour l’avenir du Sénégal. Entretien.

Pour débuter cette série, nous avons donné la parole à Siré Sy qui pense que Sonko, en résumé, est l’héritier des Majmouth Diop, Dansokho, Bathily. Un épigone de la famille de la gauche sénégalaise. Vous vous revendiquez de gauche. Percevez-vous Sonko comme un membre de votre famille politique ?

Je ne le classe pas comme un homme de gauche et lui-même ne s’en réclame pas. Déjà je me méfie d’un homme qui se revendique de Cheikh Anta Diop et de Mamadou Dia avec la même verve. Ces deux figures de la politique sénégalaise, même si elles ont à un moment donné cheminé ensemble pour des raisons tactiques face à Senghor, avaient des visions antagoniques. En témoignent, les querelles idéologiques de leurs héritiers respectifs qui prennent soin, contrairement à d’autres, de ne pas dévoyer leurs héritages.

En réalité, même les proches de M. Sonko ne savent pas ce qu’il est. Le chargé de la communication de son parti, dans une récente interview, le qualifie de libéral et Madièye Mbodj, nouveau vice-président de Pastef, considère dans une touchante insistance que M. Sonko incarne la gauche au Sénégal. L’homme renvoie à une forme d’opportunisme politique propre aux populistes. Il me fait penser aux dirigeants des partis attrape-tout de l’Après Seconde guerre mondiale. La gauche pense le monde dans une perspective émancipatrice. Elle est née de la haine de la tyrannie et prétend mettre en place un triptyque autour de l’égalité, la justice sociale et la liberté. Elle fait le serment de protéger les faibles contre les forts et de rééquilibrer les rapports sociaux autour du progrès social et de l’émancipation de ceux qu’on appelait hier les masses et qui sont désormais pour moi les dominés et les victimes de différentes formes de vulnérabilisation. Le PAI né en 1957 et ses excroissances ensuite, comme le PIT et la LD, ont mené un combat important autour de la souveraineté, la décolonisation, le panafricanisme et le soutien aux plus précaires dans la société. Ils ont surtout mené un combat pour le renforcement de la démocratie et ont obtenu des acquis face à Senghor et Abdou Diouf qui ont permis l’alternance historique de 2000.

Il y a eu un courant émancipateur fort dont les ramifications étaient insoupçonnées même au cœur de l’appareil d’État. Cette histoire de la gauche sénégalaise est belle et riche d’enseignements pour les nouvelles générations. Elle est écrite sous le prisme de la pensée pour le progrès.

M. Sonko ne semble pas aimer le progrès. C’est un individu sans idées qui ne fait pas montre jusqu’ici d’un outillage intellectuel capable de produire une pensée politique dépouillée de la violence. Son logiciel primaire est le populisme autoritaire générateur d’un clivage stérile qui prône le dégagisme, le repli sur soi, l’outrance et la haine de l’autre. Il s’agit de l’incarnation d’un nationalisme éculé incapable de penser dans la complexité et la hauteur. Des politiciens comme lui sont incapables de regarder notre pays comme un élément d’un ensemble plus large qu’est l’humanité et de proposer une esthétique de la rencontre chère à des penseurs comme Bachir Diagne ou Glissant. Or on ne peut pas être de gauche si on est contre l’internationalisme, si on ne pense pas les conditions sociales des hommes et des femmes comme universelles avec des sujets communs liés aux désordres du capitalisme, à l’économie financiarisée, aux inégalités de classe et de genre et aux défis climatiques. Ces sujets touchent tout le monde et les classes populaires en sont les principales victimes. Une pensée et une action de gauche doivent être conformes à l’universalisme du genre humain.

Dans certaines de vos publications, vous le classez dans le registre des populistes identitaires. Pourquoi ?

M. Sonko est le produit de son époque, celui d’un effondrement de l’école, de la formation d’un esprit critique, et de l’idéal politique adossé à un journalisme de bas étage. Il incarne avec un certain talent ce temps d’abaissement que nous traversons. Il n’est pas un sujet politique intéressant. Il n’a pas lu grand-chose et fait preuve à chaque prise de parole d’une inculture sidérante. Son niveau de langue et de réflexion se reflète dans ses livres et ses discours qui rappellent assez bien le caractère ordinaire de l’homme qui n’incarne aucune hauteur de vue sur des sujets techniques, intellectuels et politiques hormis la petite artisanerie fiscale qu’il maîtrise. C’est un homme vulgaire à la différence de l’intellectuel en politique qu’ont incarné Senghor, Cheikh Anta, Abdoulaye Ly, Assane Seck ou Amadou Mahtar Mbow. La personne de M. Sonko est banale, c’est un hâbleur compulsif, mais il incarne en revanche quelque chose d’intéressant, à certains égards, qui accroche les foules et le propulse en bonne place dans la vie politique nationale.

Il représente un populisme démagogique qui s’est emparé de l’époque et voue aux gémonies les élites accusées d’être corrompues et malhonnêtes. La mesure, la rigueur et le débat de fond ne l’intéressent pas. La pensée structurée et la convocation de la raison au détriment des affects deviennent suspectes. Internet arrive aussi comme un formidable outil de manipulation et de désinformation dont le contrôle permet de prendre possession des esprits, notamment chez les plus jeunes. L’obscénité et le mensonge sont devenus des armes destructrices dont se servent une catégorie d’hommes politiques pour arriver à leurs fins. M. Sonko a appris à l’école de Trump, Bolsonaro, Orban. N’ayant pas lu les grands penseurs panafricanistes ni le reste de la pensée postcoloniale ou décoloniale, il s’en limite à des diatribes racialistes, anti-impérialistes et souverainistes, notamment sur le Franc CFA, les hydrocarbures sans grand sérieux. Ainsi il flirte avec la notion d’identité, la religion, le complotisme et les bas instincts réductionnistes pour bricoler un programme politique qui séduit dans un moment où je le rappelle la complexité est délaissée et considérée comme démodée. Par exemple, quand il appelle à la mobilisation 200 000 personnes pour aller déloger le chef de l’État, ça rappelle l’univers funeste de Trump qui demande à ses partisans nourris au complotisme, aux mensonges et à la haine d’envahir le Capitole. On a vu la suite.

Les théories fascisantes de M. Sonko sont illustrées par l’attitude de désacralisation permanente des institutions républicaines. Nous avons observé le caractère chaotique de l’installation du nouveau parlement. Nous avons vu des députés de Pastef et leurs alliés faire le mariole au sein de l’hémicycle, saccager les bancs, jeter des bouteilles d’eau, arracher les micros et s’en glorifier ensuite. Le chaos ne peut constituer un projet politique, il ne change pas la vie des gens, or les Sénégalais veulent de meilleures conditions de vie. Leur attitude relevait du vacarme puéril et insupportable et par surcroît, elle était honteuse pour notre pays.

Dans une tribune publiée le 27 juin 2022, des personnalités telles que Landing Savané, notamment, alertaient sur “la vague dévastatrice que nous promettent les groupes fascisants de l’opposition radicale”. Sonko était clairement visé. Diabolisation ou réelle menace pour la nature démocratique du Sénégal ?

Je pense que M. Sonko n’est pas un démocrate et par conséquent il représente un danger pour la démocratie, la république et la survie de la nation comme bloc homogène solide. Je rappelle ses propos sur la haine supposée du chef de l’État vis-à-vis de nos concitoyens en Casamance. Ce propos aurait dû le disqualifier définitivement pour aspirer à la charge de président de la République et par conséquent garant de l’unité nationale. Permettez-moi de revenir sur des choses factuelles. Il a appelé à attaquer les sièges de médias qui donnaient des résultats qui ne lui étaient pas favorables et à fusiller nos anciens présidents. Il a incité ses partisans au pillage de domiciles de responsables publics. Il a menacé ouvertement des magistrats et des généraux et accusé l’armée de complot politicien. Il a appelé à déloger un président élu avant le terme de son mandat. Il est pour la peine de mort. Instrumentalisant une série de meurtres d’enfants, il a appelé à torturer des suspects bénéficiant de la présomption d’innocence afin je le cite « qu’ils balancent leurs commanditaires ».

Je suis d’accord avec les auteurs de la tribune sur la menace fascisante mais je ne soutiens pas leur démarche car elle n’est ni sincère ni honnête. Il s’agit d’une tribune politicienne dont la motivation n’est en rien de lutter contre les idées fascistes qui ont pénétré le corps social sénégalais. En jetant un œil sur les signataires, on voit toute la panoplie de gens qui ont sabordé l’héritage et les combats de la gauche. Ils portent une responsabilité dans l’émergence de M. Sonko comme force motrice de l’opposition. Le populisme prospère sur les renoncements des démocrates, la mauvaise gestion et l’aridité de la pensée libératrice dans la société. Quelle pensée doctrinale ces gens ont-ils proposé depuis vingt-ans ?  Quel horizon émancipateur suggèrent-ils face aux parades quotidiennes du mouvement conservateur et des hordes de M. Sonko favorables à une restriction des libertés et à la mort de la liberté ? La gauche ne pense plus. Elle est soit anesthésiée par le confort du pouvoir soit par la tentation de la revanche aux côtés de M. Sonko. Regardez l’état de mouvements historiques comme le PS, le PIT, RTA/S. Le Parti socialiste a été un formidable outil de production de la pensée avec son école de formation, ses clubs, ses groupes de réflexion et ses débats internes riches. Qu’est-il devenu ? Un mouvement de lutte pour de petits privilèges arrimé à l’APR ? La LD depuis son congrès de 2008 durant lequel elle a abandonné ses référentiels marxistes pour devenir un ersatz de parti démocrate américain, sombre et va inexorablement disparaître.

Et de l’autre côté, c’est encore pire. M. Sonko a trouvé en des hommes politiques qui le dépassent et le surpassent un formidable marchepied pour les écraser et les utiliser dans son ascension. Ces derniers, dans leur face-à-face avec Macky Sall, sont prêts à soutenir ce qu’ils savent être le pire pour notre pays. Nous observons un renoncement des élites qui laisse croire que ceux qui s’agitent sont les meilleurs d’entre nous. Ceci appelle à un sursaut pour réinvestir le mot patriote que partout les populistes subtilisent aux démocrates. Il nous faut inventer des alternatives et un imaginaire nouveau issus des entrailles du génie du peuple sénégalais.

Regardez le RND et Yoonu Askan Wi qui ont fondu dans Pastef et soutiennent ouvertement un leader au projet dangereux. Ils ont liquidé la gauche. En disparaissant dans cette nouvelle organisation, ils ont accepté de perdre la lutte finale et sabordent un héritage vieux de plus d’un siècle. Ils insufflent à leurs jeunes l’esprit de la défaite et font preuve d’opportunisme pour accompagner un mouvement ascendant qu’ils pensent capables de les mener au pouvoir. L’histoire jugera ces gens et son verdict pour eux sera implacable.

Au lieu de ranimer la figure de peuple, de penser le politique dans une dimension agonistique comme le suggère la politiste Chantal Mouffe et d’arrimer les préoccupations économiques et sociales aux défis sociétaux, ils en sont réduits à des logiques infantilisantes qui nourrissent nos adversaires et renforcent leur centralité.

Les formations politiques ont la responsabilité d’être des creusets de savoir, de culture et d’espérance pour ceux qui aspirent à servir leur pays à travers l’action politique. Ils doivent aussi propulser de nouvelles représentations qui produisent un horizon d’où découle la promesse républicaine de transformer la vie des citoyens.

Sonko semble avoir des chances raisonnables de devenir président. Qu’est-ce qui explique l’adhésion du public à son discours ?

Son arc de sympathie voire de soutien va d’un intellectuel comme Boubacar Boris Diop à un islamiste conspirationniste comme Cheikh Oumar Diagne en passant par des amuseurs publics, des cadres, des journalistes, des universitaires, des étudiants, des intellectuels précaires et des sans-emplois. Regardez la galaxie de ses soutiens : on y trouve tout et toutes les catégories sociales et cela dit quelque chose de son discours et de notre époque qui font peur. L’avènement de M. Sonko est le symptôme d’une asthénie démocratique qu’il faut interroger si nous ne voulons pas basculer dans le précipice. M. Sonko s’est érigé comme le réceptacle des colères et des haines vis-à-vis de Macky Sall. Il est aussi le visage d’une révolution conservatrice qu’incarnent des mouvements islamo-conservateurs, des opposants irréductibles à la laïcité qui s’arriment à des syndicats, des fonctionnaires précaires, des conspirationnistes et des nouveaux activistes issus pour certains du mouvement hip hop dont le propre est de ne s’ériger aucune limite. Ce alliage curieux fait de sans diplômés ignorés des radars étatiques et de ceux que mon ami le sociologue Gaël Brustier appelle les « intellectuels insérés » est le visage d’un pays où on ne pense plus et où les appareils politiques ont renoncé à propulser une vision à long terme et un imaginaire de transformation sociale.

Je pense depuis la fin de l’année 2018 que M. Sonko a de réelles chances de devenir un jour président. Il le souhaite et depuis son élection comme député en 2017, il s’est attelé à la recherche de deux choses : l’argent et un appareil. Il a les deux et s’affranchit de toutes les limites de la décence, ne s’embarrasse ni de la vérité ni de la démocratie interne pour arriver à ses fins. Il est devenu mouride par intérêt et s’éloigne publiquement de son substrat wahhabite. Il est obnubilé par le pouvoir en vérité et rêve, lui aussi, d’arriver au contrôle du butin national. Regardez même les symboles de son ascension : gros bolides, des dizaines d’hommes de main, etc. Je me souviens d’une image qui m’avait interpelé. Des femmes de son parti étaient venues le soutenir lors des événements de février/mars 2021, il s’était assis dans un grand fauteuil et trônait sur ces femmes toutes assises par terre, voilées, têtes basses. On aurait dit la cour d’un marabout qui règne sur ses disciples.

Son discours parle aux gens parce qu’il est simple et dépouillé de toute complexité. Il accuse à tout va les dirigeants de tous les maux, ment, diffame et propose des choses irréalisables qu’aucun journaliste ou intellectuel sérieux ne questionne car son armée de harceleurs sur internet a imposé une tyrannie dont la majorité refuse de s’affranchir. Il indexe la France, invente des choses et flatte les instincts populaires. Comme Trump ou Bolsonaro. Ces deux personnages n’étaient évidemment pas qualifiés pour diriger un pays. Pourtant des millions de gens ont voté pour eux. L’émergence de M. Sonko est aussi à mettre au crédit de ceux qui nous gouvernent, de certains de leurs choix erratiques et de l’incapacité à articuler une gouvernance qui change le narratif et à prendre en charge la question cruciale de la bataille culturelle qui comme le disait Gramsci est de loin supérieure au combat électoral. Les infrastructures, le retour de la croissance sont des choses positives mais que le peuple oublie le lendemain de leur réalisation. Gouverner, c’est l’art de formuler un rêve collectif, c’est produire du commun et inaugurer de nouveaux horizons de succès. C’est ainsi qu’on ancre un pays dans l’histoire et qu’on fait face aux populistes dont le rêve est le chaos.

Il ne faut pas non plus oublier la crise multiforme dans laquelle nous nous situons. Plus récemment la pandémie, la guerre en Ukraine, l’insécurité dans le Sahel, l’inflation sont des défis majeurs pour ceux qui gouvernent. Ils fournissent des efforts mais le temps de la gouvernance est décalé du temps de l’opinion qui notamment avec les réseaux sociaux veut tout et tout de suite. Cette crise appelle à un renouvellement des pratiques et des formes politiques pour faire barrage aux populistes. Mais peut-être qu’il est trop tard.

Pour finir, une petite pierre dans votre jardin : n’êtes-vous pas devenu conservateur au point peut-être de rater le projet “révolutionnaire et souverainiste” de Sonko ?

Penser pour un intellectuel, c’est se mettre en danger, c’est arriver à oublier son idiosyncrasie. J’ai des amis et camarades avec qui j’écrivais et publiais des textes, avec qui je nourrissais de formuler une offre résolument progressiste et donc de gauche qui sont partis chez M. Sonko ou en tout cas qui ont une vraie sympathie pour son action. Je vois partout ces soutiens, qui sont souvent des gens aux propos extrêmes, réfractaires à la moindre critique ; à l’université, dans la rue, durant mes déplacements à l’étranger. Le nombre d’insultes et de menaces que je reçois quand je parle de lui, etc. Tout ceci évidemment m’interroge.

Mais la politique publicitaire, la brutalité des pratiques, la violence discursive, l’injure permanente, le soutien à des putschistes, la sympathie à des régimes autoritaires, le positionnement douteux sur la crise casamançaise, l’absence de références liées aux arts et la culture dans le propos, le mensonge permanent sont autant de raisons qui ne peuvent que m’éloigner de l’homme. Un homme de gauche ne peut pas tenir les propos qu’il tient. Un humaniste tout court ne peut être constamment dans la convocation de la rhétorique de la guerre civile. Où sont les concepts de paix, d’amour, de bonheur, de tolérance, de culture dans le référentiel de M. Sonko ? Il n’est pas non plus dans la colère qui elle a un soubassement politique. Sonko, c’est le bruit et le jacassement vide de sens permanent.

Mais je remarque une chose très intéressante : pour aller chez M. Sonko, le sas est souvent la France avec qui nous avons un rapport irrationnel. Le rejet de ce pays est souvent le point d’ancrage des divers soutiens de M. Sonko et fait perdre la lucidité à beaucoup, notamment chez les vieux militants de gauche. En ce sens, Pastef est le parti le plus colonialiste de notre champ politique. Car on n’y pense jamais en toute indépendance, la France est toujours une béquille pour ces gens qui s’en servent pour attirer des foules et pour masquer une indigence théorique manifeste. Ils sont obnubilés par un pays qui dans la géopolitique stagne et se fait dépasser par d’autres puissances. Or je pense qu’il faut articuler une pensée et une pratique en lien avec le décentrement, la rencontre des ailleurs, la créolité et promouvoir un universel qui rompt avec le face-à-face permanent avec la France. Il faut apaiser la relation en élargissant la focale, en faisant preuve ni d’indifférence ni de soumission. Le monde est si vaste, les potentialités infinies, pourquoi l’Afrique francophone devrait-elle se donner comme injonction de limiter son champ de vision à la France ?

Mais pour en revenir spécifiquement à votre question, je pense que M. Sonko est souverainiste mais il a un souverainisme conservateur, d’extrême-droite comme un Zemmour, une Meloni des tropiques, un souverainisme étroit qui n’articule pas une pensée de la souveraineté populaire mais qui est un repli sur soi. Mais il n’est pas révolutionnaire. Celle-ci est une fibre dont l’âme est le renversement d’un ordre injuste pour faire advenir un printemps progressiste porteur de justice et d’égalité. M. Sonko, au contraire, ne se soucie des pauvres que pour des visées électoralistes. Regardez comment lui et ses partisans traitent une jeune femme pauvre avec qui il a un contentieux judiciaire. Et ceci m’interpelle particulièrement car je viens d’un milieu populaire. Le sort des précaires me préoccupe et il est le fil rouge de ma pensée et de mon travail. M. Sonko ne souhaite aux pauvres que la mort dans un temps court et dans un temps long. Dans un temps court car il s’agit de sa propension à appeler les jeunes de familles pauvres à constituer un bouclier humain pour le protéger, lui face à ses problèmes judiciaires et sa carrière politique. Il y a eu 14 jeunes tués en 2021 et d’autres cette année, et les autorités compétentes semblent s’être résolues à ce qu’il n’y ait aucun procès. Leurs familles ont perdu des enfants et aucun responsable ne sera jugé. Dans le temps long, le projet démagogique et populiste qu’il propose va être fatal à des milliers de gens car ses décisions puériles une fois au pouvoir vont priver des millions de Sénégalais de manger à leur faim, de s’éduquer et de se soigner.

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