PELÉ, TOUT SIMPLEMENT
Le roi Pelé n’est plus, et la terre entière le pleure. Parce que les amoureux du ballon rond, par milliards, se comptent sur tous les continents, dans tous les pays, tous les milieux, par-delà les barrières et autres catégorisations. Comment pouvez-vous, alors, soutenir qu’une partie de l’humanité le considérait, malgré tout, comme étant « un des siens » ?
Dans une chronique publiée, hier, dans le quotidien USA Today, Mike Freeman écrivait ceci : « Pelé n’était pas Américain, mais, pour une multitude d’Américains noirs, footballeurs, comme moi, il était un des nôtres. Il sera toujours un des nôtres ». Ce biographe d’entraîneur a alors dressé le portrait d’une icône galactique, une divinité ! Il a confessé s’être souvent surnommé Pelé, dans sa jeunesse, comme tant d’autres, d’ailleurs.
Désigner Pelé comme étant un des leurs aurait pu faire suspecter Mike Freeman de récupération raciale, si le défunt roi du football ne s’était lui-même assigné la mission de rendre, par sa prestance sur la pelouse, une certaine fierté à ceux qui se reconnaissent en lui, et qui sont la partie en question de l’humanité. Au-delà des résultats, des trophées et du beau jeu, il tenait à ce que la gloire que lui conférait son génie rejaillisse sur eux.
Comment recense-t-on donc cette partie de l’humanité ?
A l’époque où Pelé rayonnait, notamment en Coupe du monde, les Noirs, aux États-Unis, subissaient la ségrégation raciale. Ceux d’Afrique noire se débattaient pour se libérer du joug du colonialisme. Voir « un des leurs » impressionner ainsi la planète ne pouvait être qu’une source de fierté pour ses frères de couleur, en Afrique, aux États-Unis, et même au Brésil. C’est précisément ce sentiment qu’exprimait un auditeur qui rappelait hier, sur l’antenne, l’état dans lequel, depuis leur village de Sokone, au Sénégal, ses amis et lui avaient vécu, en 1958, les prouesses de Pelé, à la radio : « Nous en étions très fiers, parce qu’il était noir, comme nous », disait-il.