Sonko et le français, une histoire d’amour (Par Samba Alar)*
Sonko et le français, une histoire d’amour
Monsieur,
Ma sensibilité de linguiste fut piquée en écoutant, au hasard de la Toile, la déclaration que vous avez faite la veille de votre première audition au palais de justice de Dakar. Vous y avez commis des fautes grossières, indignes d’un présidentiable ou de qui se prétend tel. Un embarrassant « s’est enquéri » (la forme « enquéri » n’existe pas en français, on dit « s’est enquis »), un pléonastique « partager en commun », un pataquès chuintant sur une liaison imaginaire, une paire de solécismes pendables («le ministère de l’Environnement qui n’en est pas habilité » au lieu de « qui n’y est pas habilité », « un sénégalais, fusse-t-il un opposant » au lieu de « fût-il »), quelques barbarismes follets (*regresse au lieu de régresse, *rebellion au lieu de rébellion,*au moins prononcé au moinss,*opprobre prononcé opprobe), une impropriété inédite (« hériter d’un pays en lambris » au lieu de « lambeaux »), et ainsi de suite. Le florilège de fautes était stupéfiant ; sitôt que vous prononciez l’une, je pressentais la suivante. C’est à peine si vous parveniez à faire une phrase correcte.
Pourquoi ne vous aidez-vous pas d’un téléprompteur ? Ce gadget fort utile vous épargnerait peut-être le ridicule. Il ne peut toutefois vous donner ce que la nature vous a refusé : le talent.
Victor Hugo, que vous ne connaissez sans doute que par ouï-dire, aimait à dire que « la forme, c’est le fond qui remonte à la surface ». Condillac (vous vous renseignerez), que « l’art de bien penser se résume à l’art de bien parler ». Ces aphorismes permettent d’appréhender le lien inéquivoque qui unit les mots aux idées, et de comprendre que les fautes de langage correspondent toujours à un mésaise de penser – encore nous faudrait-il démontrer lequel, du langage ou de la pensée, précède l’autre dans l’interprétation objective du monde.
Vos grossières et récurrentes fautes de langage révèlent donc une pensée mal structurée. On ne peut, par conséquent, se fier à vos idées politiques. Sensorielles plus qu’elles ne participent de la raison, elles ne devraient pas avoir d’avenir.
J’avoue ne pas être trop surpris par vos lacunes grammaticales et oratoires. J’en avais l’intuition à lire le récit de votre jeunesse et l’énoncé de vos intérêts : le reggae et les chiens ne prédisposent pas à la rhétorique.
Que ne briguez-vous un poste dans le sport, microcosme où l’illettrisme n’est pas rédhibitoire, s’il n’y est requis.
Mais non, de grâce, la fonction de président de la République : elle suppose des ressources oratoires et intellectuelles qui vous font défaut. Et Chateaubriand de prévenir : « L’ambition dont on n’a pas les talents est un crime. ».
Je vous ai à peine nommé, Monsieur, ne voulant pas vous embarrasser. Désireux, toutefois, que mon envoi vous parvienne et vous touche, voici une adresse : siège national du parti Pastef, VDN, Dakar.
* Par Samba Alar
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